jeudi 9 février 2012

Francois Hollande - 09 02 2012 - Orléans - L'école et la Nation

En conclusion de son déplacement à Orléans le 9 février, François Hollande a prononcé un grand discours sur l'Ecole et la Nation, revenant sur les valeurs de la République et l'éducation.



Monsieur le Maire, cher Christophe, Monsieur le Président, cher François — c’est bien de porter un beau prénom comme ça pour être président ! Mesdames et Messieurs les élus, Mesdames et Messieurs, chers amis, je suis venu ici à Orléans, à Saint-Jean, pour vous parler de la France, de ce qui nous rassemble, pour vous parler de l’Ecole de la République, qui est le fondement de notre pacte démocratique.
J’ai mis, vous le savez, la jeunesse au premier rang de mes engagements dans cette campagne présidentielle, non pas pour écarter les autres générations, mais parce que la jeunesse, c’est l’atout de la France. Nous sommes le pays en Europe qui est le plus jeune, qui a la vitalité démographique la plus importante. Notre jeunesse n’est donc pas une charge, n’est donc pas un danger ou un risque. Notre jeunesse c’est une chance, c’est un levier, c’est une opportunité.

J’ai voulu mettre la jeunesse au premier rang de mes engagements parce qu’elle est la condition de notre redressement. La compétitivité, dont on va nous parler beaucoup au cours de cette campagne, ce n’est pas seulement une comparaison entre des coûts — le coût du travail, le coût du capital — la compétitivité c’est la capacité technologique, c’est l’investissement humain, c’est le savoir-faire, c’est le niveau de formation d’une Nation. Notre jeunesse nous fournit les meilleures armes dans la mondialisation.

J’ai voulu mettre jeunesse au premier rang de nos priorités parce que c’est la condition, aussi, de la cohésion nationale. La jeunesse, elle est diverse, par ses origines, ses parcours, ses couleurs, ses territoires. Et en même temps, elle porte des aspirations communes : la réussite, la dignité, la capacité de réussir sa vie.

Il est de notre devoir de l’unir, cette jeunesse, autour des mêmes valeurs, celles de la République, celles de la laïcité, les valeurs de civisme, l’engagement. Bref, ce qui fait une société. C’est la raison pour laquelle responsabilité de l’Ecole est immense. Et je voulais ici, ce soir, vous en parler.

La campagne présidentielle est un moment majeur de notre vie démocratique. C’est l’occasion, d’abord, de choisir un chef de l’Etat. C’est important. Il faut qu’il puisse nous représenter avec dignité, avec respect, avec élévation d’esprit. Les Français feront donc le choix qui leur paraîtra le meilleur.

Une campagne présidentielle, c’est aussi le choix d’un projet, c’est-à-dire des orientations qui vont être autant d’engagements — si tant est qu’un candidat présente des promesses pour les tenir… Il sera facile de le vérifier pour le candidat sortant. Mais pour ce qui me concerne, ce que je dis devant vous, j’aurai obligation de respecter la parole que je prononce.

Nous sommes conscients, et vous l’êtes aussi, que nous traversons une crise, une crise qui n’est pas terminée, une crise financière, une crise économique — et notamment en Europe -, une crise sociale profonde avec des inégalités considérables, une crise budgétaire. Nous savons bien que nos moyens sont limités. C’est pourquoi j’ai proposé qu’il y ait un redressement — redressement de nos comptes publics, redressement de l’industrie, redressement de notre économie — mais un redressement dans la justice.

L’élection sera aussi le choix des Français pour, en définitive, la voie qu’ils peuvent emprunter pour leur avenir.

Enfin, l’élection présidentielle, c’est aussi une conception de la société et même de la République qui est en cause. Dans quel pays voulons-nous vivre, avec quelles valeurs, avec quels principes, avec quel respect pour les principes et les valeurs que nous posons ?

Je veux ici vous livrer, en définitive, ma conception de la République et de la France.

Nous sommes un grand pays avec une longue histoire, et qui ne se résout pas à être une Nation parmi d’autres. Nous ne voulons pas affirmer notre existence par arrogance, mais nous considérons, sans doute parce que nous venons de loin, parce que nous avons surmonté des épreuves, parce que nous avons — et les plus anciens s’en souviennent — franchi des étapes essentielles pour notre construction nationale, nous considérons que nous avons un message universel à apporter.

Nous ne nous vivons pas comme une exception mais comme une construction qui peut inspirer d’autres, mais qui peut aussi tirer de ce qui se passe ailleurs un certain nombre de références ou d’exemples. Nous n’avons pas non plus vocation à l’alignement, et encore moins à la soumission de la France à la finance, aux marchés ou à des disciplines sans perspective.

Nous n’avons pas besoin non plus qu’on nous impose un modèle, même estimable, même respectable.

Parce que nous sommes la France et que nous avons vocation à trouver par nous-mêmes les atouts, les forces, les capacités de nous redresser, tout en prenant parmi tous nos voisins ce qui peut nous servir de référence.

Je sais aussi que des doutes se sont installés chez beaucoup de nos concitoyens. Non pas sur eux-mêmes — ils gardent confiance dans leurs capacités — mais sur la place de la France, sur son destin, sur son avenir.

Comment en serait-il autrement quand le chômage est au plus haut, quand la croissance au plus bas ?

Comment en serait-il autrement quand le déficit commercial — c’est-à-dire la différence entre les exportations et les importations — est à un niveau record, 70 milliards à la fin de l’année 2011 ?

Comment n’y aurait-il pas de doute, d’inquiétude, d’interrogations quand la Cour des comptes elle-même nous apprend que la dette publique serait proche, à la fin de l’année 2012, de 90 % de la richesse nationale, alors qu’elle n’était que de 60 % il y a dix ans ?

Oui, il y a du doute, il y a de la défiance quand il n’y a pas, au sommet de l’Etat, une volonté de tirer tout ce que nous sommes vers le haut.

Je sais aussi que nous ne parviendrons à nous mettre dans la meilleure des démarches pour sortir de la crise que si nous mobilisons tous les acteurs.

D’abord les acteurs publics, l’Etat, les collectivités locales — et il faudra faire un nouvel acte de décentralisation. Mais aussi les acteurs privés, les entreprises grandes et petites, les salariés et leurs représentants, les chercheurs, les universitaires, bref tous ceux qui peuvent permettre la création de notre pays.
C’est la raison pour laquelle j’avais évoqué un pacte productif, qui n’est pas une suite de bricolages fiscaux, qui n’est pas non plus une improvisation de dernière heure, qui n’est pas l’invention de je ne sais quelle taxe qui nous protégerait de tout, mais au contraire une stratégie cohérente autour de la transition entre des modes de production qui sont ceux d’hier et ceux que nous avons à inventer pour demain. Transition technologique, transition numérique, transition écologique ; tout ce que nous avons à faire, c’est de préparer l’avenir.

Mais les Français n’accepteront un effort que s’ils pensent qu’il est juste.

Ils ne peuvent pas admettre le creusement des inégalités, l’indécence des rémunérations, la précarisation des plus fragiles — 8 millions de nos compatriotes vivent en dessous du seuil de pauvreté.

Ils ne peuvent pas non plus supporter que l’injustice fiscale vienne s’ajouter à l’arrogance de l’argent.

J’entendais un certain nombre de patrons — je ne citerai pas lesquels, il y en a un qui possède un grand journal… — qui menaçaient de partir en exil, rien que cela, si des sacrifices leur étaient demandés.

Beau patriotisme de la part des plus grandes fortunes, celles-là même qui se sont constituées sur les marchés de l’Etat !

Et qui viennent nous dire lorsqu’elles sont sollicitées — c’est quand même normal au regard des faveurs qui leur ont été distribuées depuis cinq ans — qu’elles sont rétives à la solidarité et frileuses devant l’impôt.

Voilà pourquoi j’ai proposé une réforme fiscale, non pas pour spolier, pour capter, pour empêcher ou pour freiner l’initiative, mais au contraire pour permettre que l’équité soit posée, que la transparence soit faite, et une certaine simplicité dans les modes de prélèvement.

D’où l’idée de rapprocher l’impôt sur le revenu et la contribution sociale généralisée, de faire qu’il y ait pour les entreprises des taux d’impôt sur les sociétés qui varient selon la taille desdites sociétés, de faire que notre fiscalité locale soit rénovée.

Bref, de faire cette réforme fiscale qui est souhaitée non pas pour tirer des recettes supplémentaires, mais pour répartir différemment la charge publique.
Les classes moyennes n’ont rien à craindre. On voudrait les affoler… Elles n’ont pas besoin d’être affolées, elles sont déjà suffisamment prélevées, parce que finalement, les efforts qui ont été demandés depuis cinq ans l’ont été sur les classes moyennes.

Ce sont elles qui payent plus d’impôts sur le revenu, qui payent plus de cotisations, qui payent plus de contributions sur les mutuelles, qui sont victimes des déremboursements. Ce ne sont pas les plus fortunés, qui ont été au contraire protégés !

Alors, il faudra faire le redressement, il faudra le faire dans la justice. Mais il faudra aussi préparer l’avenir.

Et l’Ecole fait partie des secteurs qu’il nous faudra sauvegarder, protéger, et même qu’il faudra considérer comme prioritaires.

Le redressement dans la justice, et l’espérance dans la République.

La République, c’est bien plus que des Institutions, qu’il conviendra d’ailleurs de rénover pour donner plus de pouvoir au Parlement, plus de libertés aux collectivités locales, plus d’indépendance à la Justice — elle en réclame — plus de droits aux partenaires sociaux, de démocratie dans l’entreprise.

Car la République n’est quand même pas le pouvoir d’un seul qui déciderait de tout, sur tout, partout !

La démocratie, elle est exigeante.

Elle suppose que ce ne soit pas un pouvoir apanage d’un parti, qui devient vite un clan, d’un entourage qui se croit tout permis aujourd’hui, et d’une Droite qui considère que l’Etat lui appartient — et qu’il y a peut-être une élection, mais quand même, c’est dommage !

Parce que la Gauche n’aurait pas de légitimité ! Rendez-vous compte, elle a déjà gouverné, c’était il y a dix ans ! On nous en fait encore reproche !

Ce qui se passe aujourd’hui serait de notre faute, alors même que le gouvernement de Lionel Jospin avait rétabli les comptes publics, et notamment les comptes sociaux, que le déficit commercial avait été réduit à zéro, que la dette publique avait été contenue.

Et voilà qu’on nous fait le procès ; ce serait à cause des 35 heures !

Mais les 35 heures ont été tellement assouplies qu’aujourd’hui, ce n’est plus qu’une durée légale. Et quand nous arrivons à démontrer que nous n’y serions pour rien, dans les mésaventures du pouvoir actuel, voilà qu’il remonte à François Mitterrand, et même au Front populaire !

Heureusement que j’ai salué la mémoire de Jean Zay, parce que sinon, ce serait de sa faute si l’Education nationale, aujourd’hui, était menacée !
La République ce sont des institutions mais ce sont aussi des valeurs qui nous permettent de vivre ensemble, qui nous élèvent les uns les autres, quelle que soit notre condition, autour d’un même projet au service d’un intérêt général, au service d’une grande cause qui nous rassemble, nous réunit ; la jeunesse, la génération qui vient, la capacité de donner à chacun l’espoir d’une vie meilleure.

La République c’est un combat.

Elle nous unit autant qu’elle nous sépare, chacun a sa sensibilité.

Mais la République, quand on regarde ce qu’elle a permis depuis deux siècles, c’est le mouvement qu’elle a imprimé par ses valeurs qui a fait avancer la France.

Car elle est exigeante, la République. Quand elle pose « Liberté, Egalité, Fraternité », il faut être à la hauteur.

Il faut être capable de traduire ces principes et ces valeurs dans la réalité.

Nous en sommes loin, si l’on songe aux inégalités qui demeurent pour la réussite à l’école, si l’on songe au chômage, au logement qui n’est pas encore accessible à tous.

Il faut attendre le grand froid pour que l’on découvre, hélas, qu’il y a des hommes, des femmes qui dorment dans leur voiture, qui sont dans des campings et qui sont encore dans la rue.

Où est la République aussi en matière d’accès à la santé ? Et quelle est la place de la République quand, dans certains quartiers, certaines personnes âgées ou des jeunes ont peur de sortir soit pour faire leurs courses soit pour aller à l’école, tant il y a là quelques caïds qui font, hélas, régner une loi qui n’est pas celle de la République ?
La République est rassembleuse.

Et moi, je ne distingue pas les Français selon leurs origines — sûrement pas, je laisse ça à d’autres. Selon leur sensibilité pas davantage. Je ne distingue pas les Français, même, selon leur vote — comment le savoir ? Ici, j’ai une petite idée, mais nous ne sommes pas encore représentatifs… Cela viendra !

Il y en a peut-être, je le dis à chaque réunion, qui se sont glissés pour voir, des curieux, et même des amis du camp d’en face qui, à la fin de la réunion, seront des amis tout simplement !

Ma conception de la République, c’est le rassemblement, c’est la réunion, c’est la réconciliation, c’est le travail pour tous, dès lors que le citoyen veut se mettre au service de la Nation. Et chaque fois que la Gauche a su se mettre à la hauteur de la France, elle l’a fait avancer et elle a gagné pour elle-même et pour le pays.

Je m’adresse à tous ces Français négligés, abandonnés, angoissés pour eux-mêmes et surtout pour leurs enfants, soucieux de l’avenir de notre pays, mais aussi du sort qui sera réservé à la génération qui vient. Je leur dis : retrouvons ensemble le chemin des valeurs de la République et de notre Histoire.

Ne cédez pas à la tentation d’aller vers des extrêmes qui n’ont rien à voir avec la République et ses valeurs.

Grandissez-vous ! Regardez votre histoire, soyez à la hauteur de la France, si vous voulez être des Français citoyens et fiers de leur pays ! Ne vous détournez pas ! Ne cédez pas à la passion ! Ne cédez pas à la facilité, à la stigmatisation de l’autre ! L’autre, ce n’est pas l’étranger. L’autre, c’est le citoyen qui, demain, sera aussi au service de la Nation.
Le quinquennat qui s’achève aura été celui de la discorde, de la division entretenue, du désordre. Stigmatisation des populations les plus fragiles : les chômeurs, les assistés, les étrangers. Basse polémique blessante sur l’identité nationale – souvenez-vous de ce mauvais débat –, discours choquant sur la nationalité, déclarations provocatrices sur la hiérarchie entre les civilisations.

Et cette manie, dont il n’arrive jamais, au plus haut somme de l’Etat, à se départir : la manie d’opposer les Français entre eux. Ceux du privé, ceux du public. Les jeunes, les plus âgés. Les catégories sociales entre elles. Les territoires.

Comme s’il fallait diviser pour régner. Eh bien, non !

En République, il faut rassembler pour diriger, pour réformer, pour avancer.

Et les rouages essentiels de notre administration, de notre Etat, ont été mis en cause : les magistrats, les hauts fonctionnaires, les enseignants.

Voilà pourquoi, après cinq ans, notre pays – j’en suis sûr – aspire à retrouver confiance, sérénité, apaisement. Surtout avec cette crise qui mine les mécanismes de solidarité, qui appelle des efforts et qui exige une mobilisation collective.
J’entends un candidat – qui ne l’est pas encore – et un président – qui ne le sera peut-être pas très longtemps – je l’entends évoquer dans un entretien à paraître des référendums sur de nombreux sujet – dans l’hypothèse, bien sûr, où il serait reconduit.

Des référendums ! Mais que n’y a-t-il pas pensé plus tôt ? Sur le paquet fiscal, sur les retraites, et même sur la TVA ! Moi, je suis sûr de la réponse qui lui aurait été adressée par le peuple français.
Mais, je vais vous dire le fond de ma pensée sur la meilleure façon de consulter nos citoyens sur les grandes questions : le chômage, la compétitivité économique, le pouvoir d’achat, les droits, les devoirs.

Nous sommes à la veille de deux élections, la présidentielle et les législatives. Eh bien, ma méthode est simple : que chaque candidat présente son projet, donne ses intentions, précise ses engagements, affirme sa vision – et que les Français choisissent.

Le prochain référendum, mais c’est l’élection présidentielle !

Et je connais la question qui va être posée aux Français : veut-on continuer la politique menée depuis cinq ans, ou veut-on en changer ? Veut-on poursuivre avec le candidat sortant, ou veut-on changer de président ? Veut-on prolonger le présent, ou changer d’avenir ?

Eh bien, vous voterez à la prochaine élection présidentielle pour répondre à ces trois questions !

Chers amis, je suis venu vous parler de l’école, de la promesse républicaine. Parce que la première promesse de la République, c’est l’école. Je veux que la France retrouve les chemins de l’avenir avec confiance, avec puissance, avec tranquillité.

C’est le redressement de la France. Le redressement, il est bien sûr économique, budgétaire, industriel. Mais il est aussi moral, éducatif, intellectuel. Tout se tient. La connaissance, le savoir, l’école : ce ne sont pas seulement des dépenses, ce sont des investissements.

En France, il n’y aura pas de reprise économique durable s’il n’y a pas un investissement dans l’école. Tout démontre qu’il y a une corrélation étroite entre la qualification et l’emploi.

Les mieux formés trouvent plus facilement que les autres les postes de travail qu’ils revendiquent. Et, de la même manière, plus un pays est capable d’élever son niveau de formation, de connaissance, de savoir, plus haut est son niveau de croissance.

Et, de ce point de vue, les dernières années, celles que nous venons de vivre, n’ont pas été bonnes.

L’école a été dégradée. L’éducation est devenue une variable d’ajustement sur le plan budgétaire. Les suppressions de postes se sont accumulées. Et, derrière ces chiffres, il y a la réalité humaine.

Je la connais : des parents inquiets, des élèves parfois en souffrance, des professeurs fatigués qui ont le sentiment de ne pas être soutenus par la République, des classes surchargées, des élèves encore trop souvent laissés sans enseignant, des manuels scolaires qui ne sont même pas imprimés à temps, le manque d’équipements partout…

Et, surtout, l’échec scolaire inacceptable. Une forme de scandale, incroyable et inadmissible gâchis. Rendez-vous compte : 150 000 jeunes sortent chaque année du système scolaire sans qualification ni diplôme !

Et des inégalités sociales parmi les plus fortes des pays industrialisés qui s’accroissent, des performances en lecture et en mathématiques qui régressent, près de 40 % des élèves qui arrivent au collège avec une trop faible maîtrise de la langue écrite. Voilà la plaie, pour notre démocratie !
Comment imaginer que tant de jeunes sortent du système éducatif avec un sentiment d’être déjà des vaincus, des perdants, sans que cela n’entraîne un doute sur notre société, une perte de repères, de civisme et, finalement, une rupture dans le pacte républicain. En faisant des économies sur l’école, on l’affaiblit. On ampute le potentiel de croissance du pays. Je ne peux pas l’accepter !

Je ne suis pas de ceux qui pensent qu’avant, tout était parfait. Qu’il y avait une école mythique, un âge d’or.

Ce serait là un argument paresseux. Il ne s’agit pas pour moi d’entretenir une nostalgie, de cultiver une illusion qui n’a jamais existé, car le système éducatif a continûment progressé. Il a accueilli de plus en plus de jeunes. Et, en même temps, je veux une refondation. Pas une restauration : une refondation de l’école.

Ces cinq dernières années, la France a perdu beaucoup de temps et de force. Nous héritons d’une dette éducative. Au même titre qu’il existe une dette financière, une dette budgétaire : eh bien, il y a une dette éducative.

Chacun le sait : les premières années de scolarité sont déterminantes. Lorsque des difficultés ne sont pas traitées dès les premiers apprentissages, il est très difficile de les corriger ensuite. Les élèves qui peinent à la fin du CP ou du CE1 éprouvent des problèmes tout au long de leur scolarité.

Certes, la France dispose d’écoles maternelles qui nous sont enviées dans le monde entier. C’est une invention française, la maternelle. Celle-ci a été attaquée, depuis cinq ans et peut-être même davantage. Le taux d’accueil des enfants de moins de trois ans est passé de 35 % à 13 %.

La formation initiale et continue, si nécessaire, des enseignants a été supprimée, mise en cause.

Et la France compte maintenant un taux d’encadrement dans l’enseignement primaire de 15 % inférieur à la moyenne que les pays développés.

Cette situation a été aggravée, ces dernières années, par cette réforme des rythmes scolaires – invention terrible qui consiste à réduire l’année scolaire et allonger la journée scolaire, ce qui fait que nous avons une année sans équivalent dans aucun autre pays : 140 jours de classe par an !
Finalement, cette équipe au pouvoir veut augmenter le temps de travail de tous les salariés, et réduire le temps de travail des élèves… Allez comprendre ! Mais des journées plus longues, auxquelles on a rajouté désormais des cours, y compris pendant la pause du déjeuner, en contradiction totale avec toutes les recommandations des rythmes d’apprentissage.

Et c’est pourquoi, pour toutes ces raisons, j’ai décidé de faire de l’école maternelle et de l’enseignement primaire une priorité. Parce qu’il faut commencer par le commencement. Il faut investir là où l’arme éducative est la plus efficace.
Cette priorité se déclinera en plusieurs propositions.

D’abord, le taux de scolarisation chez les enfants de plus de deux ans sera relevé, en priorité dans les zones de grande difficulté scolaire.
Pour la maternelle, il y aura une obligation d’accueil, pour le service public, à partir de l’âge de trois ans, dans l’enseignement public. Je ferai respecter cette obligation.

L’encadrement scolaire, notamment dans les écoles qui cumulent le plus de difficultés – sociales, familiales, territoriales – aux moments clés de la scolarité, sera là encore renforcé. Et je m’engage sur le principe : plus d’enseignants que de classes. Parce que, parfois, il faut y mettre la présence humaine indispensable si on veut lutter contre l’échec.

Et dans ces classes-là, les classes charnières, les classes décisives, ce sont les enseignants les plus expérimentés qui seront affectés – et pas les plus jeunes, qui ne sont parfois pas armés pour affronter ces difficultés.

Les rythmes scolaires seront réformés, en allongeant le temps sur l’année et en diminuant les surcharges journalières, sans diminuer bien sûr le temps passé à l’école.

Il y aura aussi la fin des évaluations permanentes, qui aujourd’hui accablent les professeurs et qui ne produisent que des statistiques. Bien sûr que je suis favorable à l’évaluation de l’école, mais à une évaluation indépendante et incontestable.

Les pédagogies doivent évoluer. Le travail en équipe doit être encouragé. Le recours aux exercices, à l’implication des élèves, tout autant. Tout ce qui doit être fait, c’est pour permettre l’épanouissement de l’élève. Et c’est ainsi que notre école sera une école de l’excellence.

Il existe désormais un socle commun de compétences et de connaissances, inscrit dans la loi. Nous ne reviendrons pas sur ce principe. Et les programmes de l’école primaire et ceux du collège devront, en concertation avec les personnels, être revus afin d’être en cohérence avec ce nouveau socle qui sera lui-même repensé.

Les systèmes éducatifs les plus performants sont ceux qui assurent une formation initiale et continue des professeurs, de grande qualité. L’actuel gouvernement a détruit cette formation. Pour des raisons idéologiques. Pour des raisons budgétaires, surtout. Pour des raisons, aussi, d’incompréhension sur ce qu’est le métier. Mesurons la gravité de ce geste qui a été accompli. La Cour des Comptes vient de livrer son rapport : il est accablant sur cette réforme, cette suppression de la formation des enseignants – qui n’a rien rapporté au budget de l’Etat et qui a découragé les vocations. Donc, je rétablirai la formation initiale et continue des professeurs.
Les universités auront la responsabilité de cette formation. Les actuels IUFM se transformeront en Ecoles supérieures du professorat et de l’éducation. Je souhaite que tous les professeurs, quels que soient leurs niveaux de recrutement, qu’ils se destinent à enseigner en maternelle ou qu’ils se destinent à être à l’université, partagent un moment de formation commun dans ces écoles supérieures. C’est cela, la République ! C’est l’échange entre la théorie et la pratique, la recherche pédagogique, l’expérience et les niveaux de formation. L’année de stages sera donc rétablie.

Et pour remédier à la crise du recrutement – qui est réelle, tant les vocations ont été découragées –, et pour redonner à l’Education nationale son rôle exemplaire de promotion – parce que dans chacune de nos familles, nous avons vécu ces promotions à travers l’école et à travers le métier d’enseignant, les étudiants de milieux modestes ont pu devenir enseignants grâce à un système qui existait par le passé –, eh bien nous ferons en sorte de financer des études longue, avec une filière de prérecrutements pour former des enseignants le plus vite possible, dès la licence, de façon à orienter les vocations et à aider les jeunes à financer leurs études.

Le collège. Il concentre bien des difficultés. Mais, contrairement à ce qui est dit ou prétendu, le collège unique permet aussi la diversité des parcours. Ce n’est pas un système où tous les élèves passent sous la toise. Nous avons besoin d’une structure commune à tous les élèves.

J’étais donc là, il y a quelques minutes, pour saluer la mémoire de Jean Zay, qui avait lui-même inventé l’école unique, préfiguration du collège unique. Et voilà qu’on nous ferait procès ? Parce que, finalement, il y aurait nécessité d’orienter plus tôt les élèves, pour les écarter et les conduire vers l’apprentissage ! Il faut des apprentis. Il faut de l’enseignement manuel. C’est nécessaire. Il faut la valoriser. Il faut un enseignement professionnel. Mais, en même temps, l’orientation ne peut pas être trop tôt – sinon, nous savons bien qu’elle sera un déterminisme social, une sélection en fonction du milieu où les enfants de pauvres iront toujours dans les mêmes filières.
Là aussi, lorsque nous regardons ce qui fonctionne le mieux en Europe et dans le monde, eh bien le système éducatif qui a le plus de performance, les meilleurs résultats, c’est celui où il y a une importance et une durée du tronc commun.

Voilà pourquoi je refuse – je l’ai dit – les orientations précoces.

Voilà pourquoi je refuse une orientation dès la fin de la cinquième, parce que c’est trier encore au plus tôt et aggraver les inégalités.

Ce que je veux, c’est l’inverse : permettre à chacun de construire ses choix positivement, lui donner la possibilité d’acquérir des moyens de sa culture, de sa citoyenneté, de sa liberté, dans un collège qui réunit tous les enfants de la République. Et faire de nos filières professionnelles des vraies filières d’excellence, avec des orientations positives et pas imposées, et des débouchées assurées, et pas subis.
Ce que je veux, c’est une réforme de l’orientation.

C’est nécessaire pour respecter le premier choix et pour permettre de garantir un second choix, pour faire qu’il y ait de la mobilité, qu’aucun destin ne soit préétabli à un âge tellement précoce de la vie. Je veillerai à ce que les élèves de l’enseignement professionnel, ainsi que leurs enseignants, trouvent le soutien et la reconnaissance de la Nation.

Au moment où nous parlons de réindustrialisation, de pacte productif, de patriotisme industriel, commençons à donner la formation au plus haut niveau à ces futurs techniciens ou ouvriers dont nous avons tant besoin, pour qu’ils deviennent demain, par la promotion, nos ingénieurs ! Du CAP au diplôme d’ingénieur, c’est une élite professionnelle que nous avons à former avec énergie, avec enthousiasme.
Je voudrais que les lycées d’enseignement général, technologique, agricole et professionnel se rapprochent, et que les jeunesses se mêlent. Qu’il y ait, là aussi, des échanges, des coopérations, des projets communs.
Il faut aussi réserver aux bacheliers des filières technologiques et professionnelles des formations dans le supérieur – qui étaient prévues pour ces lycées et qui ont été captées, on le sait, par d’autres lycées qui ont vocation à fournir, paraît-il, les meilleurs.
Enfin, je veux évoquer ce qui est une dimension de l’éducation : la dimension artistique. J’évoquais, là encore, la mémoire de Jean Zay – qui était ministre de l’Education et des Beaux-Arts. Eh bien, oui, nous avons besoin de ce « goût de l’action », de « l’exaltante admiration des belles œuvres ». Chaque élève doit y avoir accès, quel que soit son milieu social, le quartier, la commune où il vit, son degré et sa filière d’enseignement. Et c’est pourquoi je lancerai un grand plan pour l’éducation artistique.

Je développerai aussi la culture scientifique, qui ne doit pas être un élément de sélection, mais une culture de l’expérience, de la recherche, de l’observation, de la créativité.
Et, de la même façon, le sport doit être regardé comme une discipline, comme une façon, aussi, de s’épanouir, de connaître son corps et de faire en sorte, là encore, de pouvoir équilibrer les activités sportives et les activités intellectuelles – si tant est que le sport n’exige pas, aussi, une conception intelligente de son exercice.

C’est pourquoi je veux cette éducation globale, qui mêle tous les aspects de la formation, du savoir, de la connaissance, de la culture, de la civilité et du sport.

Enfin, les nouvelles technologies ne peuvent pas rester à la porte de nos écoles, de nos établissements.

Je sais l’effort que font les collectivités locales pour doter un certain nombre de nos établissements, lycées, collèges voire écoles de moyens numériques. Je le fais dans mon propre département. Et chaque élève de collège, dans mon département, reçoit dès la sixième un ordinateur portable.

Que m’a-t-on dit, à ce moment-là ? On m’a dit : c’est terrible, vous allez changer la pédagogie.

Le problème est que les enseignants n’ont pas été formés à ces nouvelles technologies. Il faudra faire un grand plan de formation pour ces nouvelles technologies, si nous voulons les diffuser. Si nous voulons faire en sorte que les manuels puissent être intégrés sur le plan numérique, dans les dotations que nous offrons aux élèves – ce qui allégera, quand même, le poids des cartables, vieille revendication des familles. Eh bien, là aussi, il faudra multiplier les usages, les contenus, les ressources pédagogiques, mettre des expériences en commun.

Et je demanderai aux collectivités locales, dont je sais le rôle précieux, de conforter cette diffusion des nouvelles technologies, d’accompagner les usages.

Parce que nous avons besoin de tous, pour refonder l’école. Bien sûr, l’Etat est le premier concerné. C’est sa responsabilité. Et les collectivités locales ont aussi leur part de dépenses à affecter aux écoles, aux collèges, aux régions, aux universités, aux lycées. Les régions le font de plus en plus, pour les universités. Nous avons besoin, aussi, de tout ce qui fait, en définitive, la science, l’art – c’est-à-dire la présence de chercheurs, d’artistes, de sportifs dans nos lieux de formation et de culture.
Je ne néglige pas, non plus, le redressement moral. Le savoir doit être valorisé. L’école est faite pour transmettre de la connaissance. Personne ne doit être jugé indigne de lire La Princesse de Clèves, au prétexte que l’un d’entre nous – j’espère qu’il n’est pas présent ici ! – a eu des difficultés pour accéder à cette lecture !

Mais j’aurais pu parler de Madame Bovary ou d’autres œuvres. La culture n’est pas l’apanage d’une catégorie sociale ou de quartiers ! La culture est à disposition de tous les élèves. Il n’y a pas de culture élevée et de culture qui le serait moins.
Le mérite ne sera pas un héritage. Il doit être un effort, qui doit être encouragé, récompensé.

La morale, c’est aussi le respect : respect des horaires, respect de l’enseignant, respect de l’autorité, respect des lois. Et, là aussi, le respect s’enseigne, comme s’enseigne l’histoire, qui ne doit pas être manipulée – c’est arrivé – mais enseignée.

Je rétablirai l’enseignement de l’histoire en terminale scientifique.

L’autorité, aussi, doit être restaurée. L’autorité fondée sur les qualités morales et intellectuelles reconnues, et sur l’exemplarité de celui qui la détient.

Et, à cet égard, la sécurité doit être assurée, aussi, dans les établissements.

Malheureusement – et en dépit de trop d’annonces, de gesticulations –, ce n’est pas le cas aujourd’hui dans un certain nombre d’établissements. Nous avons, hélas, des cas qui se répètent de violence : violence à l’égard des enseignements, violence entre élèves, violence venant de l’extérieur.

Et donc, tirant un certain nombre d’enseignements de ce qui s’est passé, j’ai proposé d’augmenter la présence des adultes dans les établissements et de permettre un travail en équipe, une stabilité de ces équipes et la création d’un nouveau métier : chargé de la sécurité et de la prévention, dans les établissements qui sont les plus exposés aux violences.
La morale aussi doit être enseignée, partout, dans l’école – et même au plus haut sommet de l’Etat.

La morale est affaire d’exemple. Elle est affaire de comportement.

La même morale pour tous !

Parce que chacun doit mesurer qu’il a des droits, mais aussi des devoirs – et qu’il appartient à tout citoyen de savoir concilier sa liberté avec celle de tous les autres. Pour enseigner cette morale, je fais confiance aux enseignants. Car, moi, je ne les considère pas comme inférieurs aux hommes de religion.
La laïcité doit être expliquée, apprise, revendiquée, réfléchie, appliquée.

Une laïcité qui n’a pas besoin d’une épithète pour donner sa signification. La laïcité se suffit à elle-même.

La laïcité, c’est une liberté. Une liberté de conscience qui doit être respectée.

Et, en même temps, par rapport à un espace public, l’école, où la religion n’a pas sa place – toutes les religions n’ont pas leur place. Même si les religions doivent être enseignées, respectées. Mais il s’agit d’assurer la liberté de chacun et la protection de tous.
Voilà le nouveau contrat que propose entre l’école et la Nation : un pacte éducatif.
Cela a un sens précis, le pacte éducatif. Cela renvoie à l’idée, belle, que l’école est l’affaire de toute la Nation, parce qu’elle prépare la France de demain.

L’école, l’éducation, ce n’est pas une politique sectorielle – même si ce sera toujours un ministère. Elle n’est pas un simple domaine d’action de l’Etat.

Elle est l’affaire de toute la société – d’abord des enseignants.

Je veux ici rendre hommage à ces professeurs, à ces métiers de l’école, à ceux qui se dévouent pour l’éducation de nos enfants et qui ne reçoivent pas toujours la récompense, au moins symbolique, de la Nation et de celui ou de celle qui la représente au plus haut niveau.

Je sais que tous les acteurs de l’école mesurent, aujourd’hui, l’importance de ce que nous avons à faire. Je sais aussi leurs préventions, leur défiance, leurs attentes : comment pourrais-je ne pas les comprendre, quand je vois toutes les attaques, parfois les réformes qu’ils ont dû subir ?
Je respecte tous les points de vue, toutes les expériences. Et je propose à chacun d’entrer dans cette concertation, sans exclusivité et sans a priori. Car il faudra faire cette refondation – et la faire ensemble.

Notre seul guide doit être l’intérêt des élèves et l’intérêt de la Nation.

Je fixe un calendrier et une méthode. La méthode, c’est la concertation puis le vote d’une loi. Le calendrier, ce sont des négociations durant l’été et une loi d’orientation et de programmation à l’automne. C’est le rythme que nous aurons à tenir – si les Français nous en donnent, bien sûr, le mandat. La belle tâche d’enseigner et d’éduquer notre jeunesse, nous la confions aux professeurs. C’est une tâche difficile. Nous sommes et nous serons à leurs côtés.
Et je demanderai, si les Français m’en donnent la responsabilité, à tous les citoyens de se tenir aux côtés des enseignants. Parce que pour former des citoyens libres, il faut des professeurs libérés de toutes les tutelles, de toutes les influences. Et, comme le disait déjà Jules Ferry, les enseignants auront autant de liberté que de responsabilité.

Et quand je dis « responsabilité », c’est n’est pas l’autonomie que la Droite essaie à toute force d’imposer – avec des chefs d’établissement, qui ne demandent rien d’ailleurs, qui devraient se comporter en patrons, des écoles qui devraient être des entreprises et une concurrence qui devrait se faire entre professeurs, élèves, établissements !

Non ! Il faut qu’il y ait une responsabilité – celle des enseignants, celle des chefs d’établissement –, qu’il y ait une confiance, qui soit portée – une confiance qui ne peut pas opposer les chefs d’établissement et les enseignants.

Une confiance qui ne peut pas être mise en cause lorsque le statut des enseignants est évoqué : comme si c’était là le verrou, la contrainte qu’il faudrait lever. Comme si c’était, finalement, le signe d’une insuffisance d’engagement des professeurs. Ce serait inexact. C’est injuste !

Quel avenir a un pays qui maltraite ses professeurs ? Qui se trouve incapable d’en recruter – c’est le cas aujourd’hui – pour assurer les besoins d’instruction et d’éducation ? Mais refuser d’entrer dans la discussion du statut des enseignants, ce n’est pas pour autant considérer que le métier ne doit pas évoluer, que ses missions ne doivent pas être discutées.
Si nous voulons réformer les rythmes scolaires – nous le voulons –, si nous voulons permettre un meilleur travail en équipes – c’est nécessaire –, si nous voulons que les cycles, les transitions, l’orientation se passent mieux et si nous sommes prêts à reconstruire une formation des professeurs digne de ce nom, alors il nous faudra parler aussi du métier d’enseignant pour le faire évoluer, le rendre plus attractif, plus efficace et qu’il puisse atteindre les nouveaux objectifs. Nous le ferons ensemble !
Depuis longtemps, la France accumule sans cesse des réformes, bouleverse son école. Mais la vision d’ensemble manque, la stratégie n’est pas comprise et les progrès ne sont pas au rendez-vous. Les personnels, tous les personnels de l’éducation sont fatigués de cette remise en cause permanente, de ces injonctions, de ces dispositifs – chaque fois nouveaux –, de cette accumulation d’obligations sans grand dessein, qui finissent par donner l’impression de n’être là que pour habiller des renoncements et des manques.
Voilà pourquoi je fais de la refondation de l’école un engagement devant les Français.

On me dit : vous courez un risque. On court toujours des risques. Peut être que le risque serait celui d’une incompréhension avec les enseignants ? Je ne le crois pas. Ils y sont prêts. Le risque, ce serait d’évoquer des moyens supplémentaires ? Eh bien, oui ! Je l’assume, ce risque !
Il y a eu, au cours de ces cinq dernières années, 77 000 suppressions d’emplois. Eh bien, moi, je propose – et j’en prends toute la responsabilité – un plan de recrutement de 60 000 personnels de l’école sur les cinq prochaines années (12 000 par an).

Cela fait débat. J’entends ceux qui disent : surtout, ne pas augmenter le nombre de fonctionnaires ! Je l’entends, aussi. Je connais nos contraintes.

Je sais qu’il faudra – et j’ai d’ailleurs pris, là-dessus, tout engagement nécessaire – stabiliser les effectifs de la fonction publique d’Etat.

Mais, en même temps, je considère que s’il y a une priorité, c’est pour l’éducation.
On me dit : ça coûte cher, 500 millions d’euros par an, rendez-vous compte ! L’allégement de l’impôt sur la fortune, c’est 2 milliards…

On me dit : vous créez des postes, vous faites des investissements. Mais vient d’être voté, à l’Assemblée nationale, un plan pour les prisons : 30 000 places, 3 milliards d’euros d’investissement, 1 milliard d’euros de fonctionnement.

C’est un choix de société, aussi !

Que préfère-t-on ? Bien sûr qu’il faut faire en sorte que les prisons soient humanisées et que les délinquants soient accueillis dans les conditions les plus sûres pour la société. Mais moi, je considère qu’aujourd’hui, la priorité c’est l’école ! C’est l’éducation !
J’entends un candidat, qui n’est toujours pas déclaré – mais enfin, cela arrive, ce n’est plus qu’une question d’heures me dit-on, et Madame Merkel, d’ailleurs, a anticipé, elle l’avait investi l’autre semaine ! – dire qu’il veut rétablir la formation initiale des enseignants.

J’en suis heureux !

Que ne l’a-t-il détruite, hélas, pendant son quinquennat ?

Il nous dit qu’il veut valoriser les enseignants. Cela lui fera le plus grand bien – enfin, surtout aux enseignants, qui en ont été privés pendant cinq ans ! Mais tout cela a forcément un coût. Et donc, moi, j’assume ce que propose!
Je considère que si nous voulons rétablir la formation des enseignants – et nous le voulons –, lutter contre l’échec scolaire, accueillir les enfants les plus en difficulté – et notamment les enfants qui sont en souffrance, qui sont en handicap – alors il faut y mettre, forcément, les moyens en personnel nécessaires. Et pas simplement des postes d’enseignants : les médecins scolaires – qui ont récemment engagé une action, parce qu’on n’en trouve plus – les infirmières scolaires, les assistantes sociales, les surveillants, les encadrants… Bref, tous ceux qui font vivre l’école, le collège, le lycée. Voilà ce dont nous avons besoin ! Si nous voulons qu’il y ait des équipes pédagogiques, un nouveau temps de travail, un déroulement de carrière, une pérennité des équipes, une coordination avec les autres institutions… : bien sûr qu’il faut une politique d’éducation avec les moyens nécessaires !
Parce que là, ce qui se passe, avec les suppressions de postes, c’est non seulement une école qui s’abîme, qui s’affaiblit, mais ce sont souvent les élèves les plus en difficulté qui sont les premières victimes des suppressions de postes : les RASED, les SEGPA, les élèves handicapés, les filières spécialisées… Voilà où on fait les économies !
De la même manière, nous aurons aussi besoin de personnel pour organiser la transition entre nos lycées et l’enseignement supérieur. Trop d’élèves se trouvent désorientés en arrivant à l’université et, finalement, abandonnent leurs études – et, finalement, un terrible gâchis pour leur famille, pour eux-mêmes et pour l’Etat, à travers les crédits qu’il met en place pour l’université.

Il n’est pas acceptable que nous ayons de moins en moins d’étudiants, et avec un taux d’échec très élevé pour les premiers cycles. J’accorderai une part de l’effort de la Nation à l’université, pour réussir cette transition.
Je suis prêt à tous les débats au cours de la campagne présidentielle sur cette question de l’école, de l’éducation et de l’université. Mais moi, je refuse l’hypocrisie qui consiste à dire qu’il est possible d’enseigner sans enseignant !

Parce que si l’on pense qu’il est possible d’enseigner sans enseignant, de soigner sans médecin, un jour des gens penseront qu’on peut aussi avoir une présidence sans président…

A un moment, il faut bien qu’un homme, une femme, exerce la responsabilité ! Nous avons donc besoin que l’ensemble de notre système éducatif reprenne confiance en lui-même.
La France a besoin de clarté, de raison et de justice.

Elle a besoin de retrouver une volonté de progresser, de réussir. Voilà pourquoi je suis venu ici, dans le Loiret.

A la fois pour me ressourcer à travers la belle image et le grand souvenir de Jean Zay, et puiser parmi vous l’énergie qui doit me conduire à convaincre les Français de cette exigence d’une refondation de l’école !

Je veux agir pour la France à cinq ans, à dix ans, à vingt ans !

Je ne parle pas simplement de moi. Mais ce que nous allons décider, là, pour les prochains mois, vaudra bien sûr pour le prochain quinquennat, mais devra se poursuivre bien au-delà de nous.

Ce que nous engageons à travers cette campagne présidentielle, ce n’est pas simplement un temps court.

Ce ne sont pas simplement des mesures d’urgence.

Ce sont des réformes durables, que nous avons à poursuivre, que d’autres feront après nous.

Nous devons concevoir notre action dans un parcours qui est venu de loin et qui nous survivra – j’en suis sûr –, qu’est le récit républicain ! Toutes les générations qui nous ont succédé, qui ont fait avancer notre pays. Et, encore aujourd’hui, nous en sommes là : voulons-nous avancer ou voulons-nous reculer ?

Voulons-nous nous résigner ou voulons-nous, au contraire, nous dépasser nous-mêmes ?

Nous n’avons pas les moyens budgétaires que notre politique pourrait, éventuellement, espérer. Mais nous ferons les choses progressivement, graduellement.

J’ai dit que mon quinquennat, si les Français m’en donnent possibilité, serait d’abord avec des réformes de structures. Ensuite, nous pourrions redistribuer ce que nous avons créé.

Mais dès la rentrée 2012, il y aura des changements pour l’école ! Parce que je sais qu’ils sont attendus. Je sais qu’il y a urgence !
Je sais que cette cause de l’école n’est pas, ici, notre exclusivité, notre propriété. L’école appartient à la Nation et pas simplement à une famille politique. Je sais que c’est une belle cause, la jeunesse, qui peut nous rassembler.

Je sais que tous les républicains peuvent se réunir autour de ce projet, si nous savons le conduire avec rigueur, sincérité, obstination. La France, je vous l’ai dit, est un grand pays, avec de grandes ressources !

Humaines, d’abord.

Chacun d’entre vous est un atout pour la France. Et les plus jeunes sont notre espoir. Nous pouvons surmonter la crise. Ce sera difficile. Il faudra faire tous les efforts de redressement dans la justice. Nous les ferons ensemble !

Mais, je vais vous donner la méthode. Il y faut de la constance.

Méfiez-vous de ceux qui changent.

Méfiez-vous de ceux qui ne savent pas quel est leur cap. Qui, un jour, appellent l’Etat à la rescousse et, un autre jour, le dénoncent. Un jour baissent les impôts des plus riches et, à la fin, augmentent les impôts de tous.

Méfiez-vous de ceux qui vous parlent de la compétitivité et qui ont dégradé le commerce extérieur.

Méfiez-vous de ceux qui inventent à la fin de leur quinquennat ce qu’ils n’ont pas fait au début, au milieu et même aux trois quarts.

Méfiez-vous de ceux qui, finalement, n’ont que la peur comme justification de leur engagement : la peur du changement, la peur de la crise, la peur de l’épreuve, la peur de l’effort.

Non ! Nous, nous n’avons peur de rien ! Parce que nous avons une volonté. Nous avons un espoir. Nous avons une grande cause. Nous avons le respect. Nous avons l’idée du rassemblement du pays.
Alors, il faut de la constance. Il faut de la cohérence. Il faut de la ténacité. Il faut aussi du respect. Du respect, de la considération. Tout commence par le respect et la considération !

Chacun, ici, au-delà de sa condition, de sa situation personnelle, demande d’abord à être respecté quand il est travailleur et qu’il ne ménage pas sa peine pour l’entreprise qui l’emploie – et qui ne peut pas supporter de découvrir un jour que pour des raisons boursières, il est abandonné en chemin.

Oui, chacun demande du respect. Le chômeur qui n’en peut plus et à qui maintenant on va discuter ses droits – en demandant même, peut-être, demain, au peuple français de faire un référendum sur les conditions mêmes de son statut de chômeur !

Oui, chacun demande le respect : les fonctionnaires qui sont au service de la Nation et qui ne veulent pas être suspectés d’être une charge pour le pays !

Chacun demande du respect : les jeunes qui veulent réussir leur vie et à qui l’on dénie, finalement, à travers une politique à courte vue, les moyens de leur propre accomplissement !

Chacun demande du respect : la personne âgée qui veut terminer son existence dignement et à qui l’on n’a même pas fait la réforme de la dépendance qui avait été promise !
Voilà : la constance, la cohérence, le respect.

La France a besoin d’un vrai débat, et non de fausses querelles.

Je pense à ces déclarations brutales – vous les avez entendues – prétendant briser les consensus, s’érigeant en voix du bon sens, et qui ne sont que des provocations semant la discorde et ternissant l’image nationale.

Nous n’avons pas besoin de ces discordes, de ces querelles, de ces désordres quand le pays appelle des solutions pour le chômage, pour le pouvoir d’achat, pour la santé, pour le logement.

Voilà les sujets de la campagne présidentielle !

Ce n’est pas de savoir si une civilisation est supérieure à une autre !

Et le courage ! Voilà que certains s’emparent de cette vertu qu’ils se sont attribuée d’eux-mêmes. Le courage.

Mais où est le courage quand on demande au pays de faire un effort alors qu’au plus haut sommet des fortunes, il y a eu, en définitive, insolence et indécence ?

Où est le courage d’appeler à voter un texte sur l’augmentation de la TVA, c’est-à-dire un impôt sur tous les Français, quand il y a eu un bouclier fiscal et une baisse de l’impôt sur la fortune ?

Où est le courage de s’en prendre aux chômeurs, aux étrangers, aux plus faibles, aux fragiles ? Où est le courage ?

Le courage c’est, au contraire, d’appeler au rassemblement, à l’effort, à la justice !

Le courage, c’est de s’en prendre à l’argent, à la finance ! Ce n’est pas de s’en prendre aux plus modestes des Français !
Chers amis, le rassemblement est nécessaire.

Rassemblement de la Gauche, c’est déjà pas mal !

Le rassemblement des Socialistes : on pensait que ce serait difficile. Vous avez vu, après ces primaires ? Tout le monde s’y est mis !

Au-delà des choix des uns et des autres, chacun fait campagne et donne le meilleur de lui-même ou d’elle-même.

Rassemblement de la Gauche : nous allons le faire !

Il y en a qui sont partis tout seuls. Je ne sais pas jusqu’où ils iront.

Je leur souhaite le plus grand succès. Mais ce que je souhaite, surtout, c’est que nous soyons, nous, au plus haut au soir du premier tour. Parce que c’est au premier tour que va se gagner la bataille !

Je ne sais pas exactement qui sera candidat – même si, maintenant, on est éclairé –, qui aura ses signatures – cela, c’est une autre affaire ! Mais moi, je ne veux pas me préoccuper des autres.

Ce que je vous dis, c’est simple : si vous voulez le changement, si vous voulez faire avancer la France en faisant gagner la Gauche, c’est au premier tour que vous le ferez.

C’est en donnant cette dynamique, cette force, cette capacité de rassemblement que vous permettrez à la Gauche d’être au rendez-vous !
Mais, c’est l’élection présidentielle qui va décider du prochain président, du projet, de la conception de la société, de la République.

Et, au lendemain de l’élection présidentielle, le prochain chef de l’Etat aura une mission plus grande encore que toutes les autres : réunir tous les Français, y compris ceux qui n’auront pas voté pour lui.

Ce sera désolant, de constater qu’une partie de la Nation n’a pas voté comme nous l’entendons. Et, en même temps, c’est la démocratie. C’est le droit de chacun. Et c’est le respect que nous devons avoir, y compris à l’égard de ceux qui ne pensent comme nous.
Et nous n’arriverons pas à redresser le pays si nous ne nous rassemblons pas.

Oh, je ne parle pas ici d’Union nationale – qui est une chimère –, ni d’ouverture – je veux vous rassurer.

Nous ne solliciterons aucun concours.

Nous ne capturerons aucun député ou sénateur venant de l’autre côté – même si nous ne refuserons aucun vote s’il nous est accordé.

Non, le rassemblement, c’est le rassemblement des Français.

Parce que nous en avons besoin. Parce qu’il faudra la mobilisation de tous. C’est le respect de nos différences. C’est l’écoute attentive de chacun. C’est la volonté d’avancer ensemble. C’est l’affirmation tranquille des convictions et le respect des libertés. C’est la reconnaissance, aussi, de ce qu’est l’intérêt supérieur du pays.
Je veux, pour la France, l’unité, le rassemblement, la réconciliation, la concorde.

Tout ce qui manque, aujourd’hui. Je sens bien que nos concitoyens qui sont fragmentés, dispersés, parfois opposés les uns les autres, ne demandent qu’une chose, là, dans ce moment : c’est que le changement puisse être aussi un moment de bonheur retrouvé, de confiance rétablie, d’image sereine, d’apaisement.

Cela fait du bien, l’apaisement, quand on a été épuisé, harassé, fatigué.

Oui, voilà ce que nous devons faire ensemble !

Faire que cette victoire soit la victoire, bien sûr, de ceux qui l’auront voulue – mais la victoire de la France.

Et, autour de cette victoire, nous ferons de l’Ecole de la République, en définitive, notre engagement et notre cause ! Et nous ferons de cette jeunesse de France – cette jeunesse qui est si impatiente, si troublée, si désireuse de réussir –, nous ferons de la jeunesse le grand espoir pour la France de demain.

Cher amis, c’est le moment, bientôt, de choisir. Cela va être long, encore, deux mois. Moi, je compte les jours !

On me dit : c’est terrible, ce qui vous arrive, vous êtes le favori. Cela fait des mois que je porte ce fardeau de favori ! Mais, chaque jour qui me rapproche de l’élection fait que le fardeau est plus léger. Je marche à mon rythme. Je n’ai pas besoin de me hâter, de me précipiter. J’en connais d’autres qui sont, maintenant, plutôt tentés par l’accélération.

N’ayez peur de rien ! Diffusez largement nos idées ! Portez notre message ! Allez auprès des Français. Donnez-leur confiance en eux-mêmes et en leur pays. Nous ne sommes sûrs de rien. Rien n’est acquis, rien n’est fait, rien n’est joué. Et je suis conscient que tout peut être, à un moment, bouleversé.
On me dit que je suis arrogant. On me dit tant de choses ! Si je faisais la liste de tous les qualificatifs dont j’ai été l’objet – je ne parle pas des pages animales du dictionnaire ! – mais, écoutez, là encore : ne nous laissons pas détourner. Atteignons notre objectif. Nous sommes attendus par les Français.

Et ce que je voulais vous dire, ici, dans le Loiret, c’est que mon premier engagement serait pour l’école, que ma première cause serait pour la jeunesse et que ma première volonté serait pour le rassemblement de notre pays ! Faites en sorte que nous puissions nous préparer à cette victoire !

Une victoire qui est attendue, qui est espérée, dont nous devrons être dignes. Une victoire à laquelle beaucoup ne croyaient pas il y a encore quelques mois, tant nous pensions que ce serait, finalement, une chape de plomb – qui nous empêcherait, peut-être, de faire l’alternance.

L’alternance : cela fait dix ans, dix ans que la Droite est au pouvoir. Et cela fait depuis 1995 qu’il n’y a plus eu un président de la République de Gauche. Il n’y en a eu, d’ailleurs, qu’un sous la Ve République. Eh bien, c’est contre cette fatalité que je me suis levé.
C’est parce que je me suis dit qu’il n’était pas possible, quand même, dans notre pays, la France – qui a fait la République, qui a fait les avancées sociales, qui a fait des conquêtes –, que ce n’était quand même pas possible que la Gauche ne soit pas là au moment où le pays est frappé par la crise, pour faire notre devoir : redresser, mettre de la justice, donner une joie forte.

Non pas rendre tout possible, mais rendre toute espérance, oui, crédible.

Voilà, chers amis !

Merci d’être venus nombreux.

J’aurais pu vous parler de tant de choses. Mais faites en sorte que le 6 mai, le changement soit là !

Que le changement soit pour l’école !

Que le changement soit pour la jeunesse, soit pour la République et soit pour la France !

Merci.

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