mercredi 7 mars 2012

Nicolas Sarkozy dans « Des Paroles et Des Actes » : des Hauts et Débats

A 47 jours du premier tour de l’élection présidentielle, pour sa première émission politique alors qu’il ne décolle pas dans les sondages et que la semaine passée fut calamiteuse, Nicolas Sarkozy jouait gros sur le gril de l’émission de France 2, DPDA.
                                                                                                                  
La mission du candidat Sarkozy était toute acceptée : mea culpa, je joue la carte de la sincérité pour me relancer.
(Lionel Bonaventure – AFP)
Au tour de Sarkozy de prendre François Hollande en revers : « puisqu’il joue le rôle de Monsieur « normal », je vais moi aussi parler franchement, une nouvelle fois montrer l’Homme ».

Et bien Nicolas Sarkozy confirme être bien plus à l’aise dans le costume de candidat que dans celui de Président !

Mais cela sera-t-il suffisant pour relancer une campagne laborieuse ?

Décryptage



Nicolas Sarkozy a commencé par faire face durant une heure aux questions que toute la France rêve de lui poser depuis cinq ans.

Par d’efficaces montages, la rédactrice en chef de l’émission, Nathalie Saint-Cricq, n’a pas ménagé Nicolas Sarkozy sur sa pratique du pouvoir et les « pêchés originels » : Fouquet’s, yacht de Bolloré, Epad, réception de Bachar El-Assad… Rien ne lui fut épargné.

Le candidat adopta la posture de la sincérité, parfois gêné, souvent amusé, riant même de lui-même, notamment sur son « Hé, Barack », apostrophant le Président américain.



Ce long moment se rapprocha parfois plus de « Confessions Intimes » que d’une émission politique, Nicolas Sarkozy expliquant très sincèrement ses excès, notamment dans le cadre du « Casse-toi pôv con ».

En revanche, sur d’autres sujets comme le yacht, Nicolas Sarkozy expliqua plus qu’il ne s’excusa, parlant une nouvelle fois de lui, de sa vie privée, de ses amitiés, et réfutant tout conflit d'intérêt ou mélange des genres.

A la question : "Où iriez-vous fêter votre élection si vous étiez réélu ? ", Nicolas Sarkozy joua à nouveau sur la corde sensible, expliquant que "cette fois", il avait une famille, solide, et pourrait donc festoyer en toute
 intimité, sans avoir besoin d'être hébergé quelque part.
En faisant ainsi étalage de sentiments qu’il considère comme relevant de sa « vie personnelle », Nicolas Sarkozy révèle ainsi implicitement aux Français qu’il est prêt à se mettre à nu pour un nouveau mandat.

Ensuite, Nicolas Sarkozy aborda le fond, face aux techniciens de l’émission, dont l’économiste François Lenglet. Ce ne fut pas la phase la plus simple, ni la plus convaincante, mais le candidat-président tenta d’expliquer ses choix et de défendre ses propositions.

Campant souvent sur ses positions, Nicolas Sarkozy montra qu'il avait travaillé ses dossiers, et quand bien même des divergences apparurent, il ne fut pas réellement pris en défaut, des données chiffrées différentes étant toujours difficilement accordables...

Il repris les thèmes qu'il souhaite mettre en avant dans le cadre de sa campagne, et notamment l'immigration, confirmant sa droitisation, mais réfutant fortement le moindre lien avec le programme du FN, quand bien même il lui en était fait la preuve.



Puis vint le débat face à Laurent Fabius.

Pour la première fois depuis cinq ans, Nicolas Sarkozy faisait ainsi face à un « vrai » contradicteur, non-journaliste.

Les mots furent durs, une certaine détestation entre les deux hommes étant flagrante, mais le débat fut de bon niveau.

Très techniques parfois, les échanges retombèrent dans l'invective souvent, ce qui ne manqua pas d'y mettre du sel et de réveiller le téléspectateur qui après près de 3h d'émission pouvait commencer à fermer l'oeil.

La joute fut ferme, tout opposant les deux contradicteurs, et surtout les chiffres, sur lesquels jamais ils ne s'accordèrent.

Chacun campa sur ses positions s'agissant des thèmes de fonds abordés : emploi, pouvoir d'achat, réforme fiscale, débat autour de la TVA sociale...

Dès lors, on assista plus à une bataille de mots qu'à une confrontation d'idées, à l'image de l'ensemble de la campagne présidentielle.

Illustration :

- Sarkozy : "Ne faites pas d'excès de modestie, ça ne vous va pas outrageusement."
- Fabius : "Outrageusement est un mot qui vous va bien."
- Sarkozy : "Vous la fausse modestie ne vous va pas au teint.
Ou encore :
- Sarkozy : "On ne change jamais, M. Fabius."
- Fabius : "J'allais vous le dire ! "

Si chaque camp trouvera que son combattant l’a emporté, l’enjeu était en tous cas de taille.

Pour Sarkozy, bien évidemment relancer sa campagne.

Pour Fabius, se positionner comme Premier-Ministrable.

 Quoiqu'il en soit, la joute verbale fut belle, faisant presque regretter que ce genre d'évènement n'ait pas lieu plus souvent, en cours de mandat notamment.

Les deux candidats étaient parfaitement préparés, Nicolas Sarkozy arguant même directement qu'il avait revu de nombreux débats de Laurent Fabius, et que celui-ci ne changeait pas.

Ses conseillers lui avaient de plus concocté de nombreuses fiches techniques, dont une fiche sur les phrases de Fabius à propos d'Hollande, dont Nicolas Sarkozy s'est beaucoup servi, au point de la rendre visible aux caméras, ce que L'Express n'a pas manqué de relever.

Les deux débatteurs se sont rendu coup pour coup.

Pour les + :  la pugnacité de Sarkozy / les bons mots de Fabius.

Pour les - : la hargne et la nervosité de Sarkozy  / le ton parfois trop professoral de Fabius

Chacun fit passer ses messages, mais dans un langage de sourds.

On retiendra deux phrases chocs :

Pour Fabius : "Votre bilan est votre boulet", renvoyant Nicolas Sarkozy à sa condition de candidat sortant.

Pour Sarkozy : "Vous êtes drogués à la dépense publique", symbolisant l'image qu'il souhaite renvoyer de la Gauche à l'opinion publique.

Quoiqu'il en soit, Nicolas Sarkozy a retrouvé ce qu'il aime le plus et l'exercice dans lequel il s'épanouit : le débat, passant d'un dossier à l'autre, citant une anecdote et tâchant, toujours,d'avoir le dernier mot.

Fabius se prit au jeu, et réussit parfois même à faire du Sarkozy, notamment à un instant où, alors qu'il exposait un argumentaire, stoppa net pour interpeller Nicolas Sarkozy sur son "sourire", alors que le sujet était sérieux, figeant sur place le candidat-Président.

 L'Express refait le match Sarkozy-Fabius


L'émission s'acheva avec Franz-Olivier Giesbert et surtout Hélène Jouan, que Nicolas Sarkozy ne pu s'empêcher de tâcler, démontrant ainsi qu'il n'a pas oublié qu'elle fut la première à faire l'étalage de problèmes dans sa vie privée il y a plus de 5 ans maintenant.

Affichant une grande proximité, une simplicité et jouant cartes sur tables, Nicolas Sarkozy jette ses dernières forces dans la bataille.

Après avoir encaissé les coups durant toute la première partie de l'émission, il pu enfin en lâcher dans la seconde pour tenter de l'emporter aux points.

Cela aura-t-il un impact dans les sondages ?

Pourra-t-il refaire son retard sur François Hollande au premier, mais surtout au second tour ?

A défaut de convaincre sur le fond, Nicolas Sarkozy aura au moins une fois de plus démontré, si besoin était, qu'il n'est jamais aussi à l'aise qu'en campagne.

Hollande et Sarkozy ont bien changé depuis cette couverture de Paris Match.

Et les deux semblent certains de pouvoir encore l'emporter.

 


Pour revoir l'émission sur Pluzz :






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