mercredi 22 février 2012

Marine Le Pen déboutée par le Conseil constitutionnel : et si cela lançait plutôt sa campagne ?



« Marine Le Pen déboutée ». « La défaite de Marine Le Pen ». Les mots sont durs, d’autant plus que sur le fond, si les commentateurs ne soutiennent pas forcément la démarche, un quasi-consensus se forme sur le fait que si Marine Le Pen et le Front National ne pouvaient pas se présenter aux élections présidentielles, cela serait une carence démocratique majeure.
Mais quelles sont les vraies conséquences de cette décision ? Pour ma part, je considère que la défaite sur le fond est largement compensée par l’éclat sur la forme. Marine Le Pen sort requinquée de toute cette polémique qui pourrait, au final, lui servir de tremplin pour relancer sa campagne.
Pour preuve, son affiche de campagne quasi-simultanément dévoilée !

Explications.

Revenons brièvement sur les faits.
Saisie par Marine Le Pen, ainsi que par Mmes Christine Boutin et Corinne Lepage qui sont également intervenues à la procédure, le Conseil constitutionnel a rendu hier mardi 21 février 2012 sa décision n° 2012-233 à la suite d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC pour les intimes).
Marine Le Pen, dans sa course aux parrainages, dénonçait la publication du nom et de la qualité des citoyens élus habilités ayant présenté un candidat à l'élection présidentielle. Ce mécanisme l’empêcherait d’obtenir les 500 signatures requises (sur environ 42 000 signataires potentiels en 2012).
Il est évident que le fait qu’une candidate que l’on situe entre 15 et 20% des intentions de votes ne puisse pas se présenter serait dramatique pour notre démocratie. Mais cela ne sera pas le cas, le Front National réussissant toujours à obtenir le nombre de parrainage.
S’agissant des autres candidats, seul François Bayrou s’en est publiquement ému. Il paraît néanmoins évident que, Marine Le Pen étant assez loin de François Hollande au premier tour et le PS profitant indirectement de sa présence dans le débat, les instances du PS auraient pu, en cas de vrai doute, se faire chevalier blanc de la démocratie et apporter à la dernière minute la poignée de parrainages manquant de la liberté d’opinion.
Mais le débat n’est pas là. Qu’en est-il vraiment de la campagne de Marine Le Pen ? Moribonde. Acculée dans ses retranchements par un Nicolas Sarkozy ayant opéré un sérieux virage à droite.
Or qu’en est-il désormais ? Marine Le Pen vient de faire la Une de tous les journaux, d’être le sujet de tous les débats.
Et bim ! Comme par magie, elle profite de cet espace médiatique créé autour de la question des parrainages (qu’elle sait pertinemment avoir au final, de son fait ou du fait d’autrui comme indiqué plus haut), pour sortir la polémique de la viande halal.

Peu importe la justesse des propos, la réalité des faits. Le pavé est lancé dans la marre.
Marine Le Pen fait ici ce qu’elle connaît le mieux : brandir les peurs secrètes, les sentiments diffus de mal –aise. Et le sujet de la viande halal est parfait pour cela. Chacun a vu naître des rayons dédiés dans ses supermarchés et tout le monde a suivi la polémique liée à la création de fast-food Quick 100% halal.
Le sujet ne demandait qu’à être ressorti, et Marine Le Pen le fait au meilleur moment pour elle, lorsqu’elle est désavouée par la plus haute Autorité de l’Etat, par ceux que l’on nomme les Sages.
L’image est si belle : « regardez-moi, lutter pour vous, contre les puissants, et l’on cherche à me faire taire. Et bien non, je parle, et je vous parle d’un sujet grave, mais simple à la fois, la viande halal ».
Voilà Marine Le Pen relancée, faisant d’une pierre deux coups. Et l’enchaînement prend désormais, car une fois l’opinion publique émue, il faut battre le fer tant qu’il se fait chaud.
D’où une seconde polémique dans la foulée : son refus de débattre avec Jean-Luc Mélenchon dans l'émission "Des paroles et des actes" jeudi soir sur France 2. Vilipendant « l’insulteur public », elle reste sur sa ligne antisystème en reprochant à la chaîne de « déshonorer le service public » en voulant lui « imposer de force cet adversaire ».
Pour moi, cette décision était ce qui pouvait arriver de mieux à Marine Le Pen, qui a su la provoquer en déposant sa QPC afin de se créer un espace médiatique qu’elle reproche si souvent aux media de ne pas lui attribuer.
Par ces polémiques très clivantes, elle capitalise ainsi sur cette décision et relance sa campagne.
Voyons ce qu’elle en fera jeudi soir.


MISE à JOUR - 22/02/2012 à 18h23

Je tombe à l'instant sur ce flash Europe1 qui indique "Légère embellie pour Marine Le Pen".

Un sondage Ifop-ParisMatch nous apprend que Marine Le Pen est la seule à connaître une embellie ce mercredi : elle est désormais créditée de 18% des intentions de vote au premier tour, soit un gain de 0,5 points par rapport à mardi.

Sa stratégie pour gagner en surface médiatique, imposer ses thèmes dans la campagne et faire parler d'elle porterait-elle ses fruits ?

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